le président de la Fédération hospitalière de France, Frédéric Valletoux, détaille les propositions de la plate-forme “Le service public de santé, une ambition pour la France 2012-2017”, lancée pour interpeller les candidats à la présidentielle.
Le thème de la santé publique sera-t-il au cœur de la présidentielle ? La Fédération hospitalière de France a l’habitude d’interpeller les candidats à la présidentielle. Après 2007, certaines des propositions de notre plate-forme avaient été reprises dans la loi “Hôpital, patients, santé et territoires” (HPST). Nous formulons ici de nouvelles suggestions pour améliorer le système de santé publique et alerter les candidats. La santé est devenue l’une des premières préoccupations des Français, parfois devant le logement et l’emploi. Ils sont très sensibles à la survie de notre système. C’est la raison pour laquelle la santé sera, je pense, au cœur de la campagne.
L’une de vos propositions phares vise à remplacer les médecins libéraux par des médecins hospitaliers dans les déserts médicaux. Est-ce possible ? Dans certains secteurs géographiques, l’âge moyen des généralistes et leur faible densité permettent d’anticiper ces “déserts médicaux”’. Pour pallier des situations de carence médicale, nous proposons que l’hôpital se substitue à la médecine générale. Parce que là où il y a carence, les usagers se dirigent en premier lieu vers les urgences, parfois pour des petits bobos ou des maladies bénignes… L’hôpital pourrait être celui qui organise l’offre de soins à l’échelle d’un territoire, par exemple en gérant un cabinet déserté par un professionnel ou en signant un contrat avec un médecin libéral pour l’installer au plus près des patients.
Vous évoquez une simplification de la loi HPST… La loi HPST a permis de grandes avancées. C’est une boîte à outils qui crée des formules juridiques, permet aux établissements de travailler avec le privé, de signer des contrats avec des médecins libéraux, de monter des partenariats, etc. Ces formules offrent de la souplesse mais ne sont pas assez utilisées sur le terrain. Il faut faire vivre ces outils.
En assouplissant le statut des établissements, comme vous le préconisez ? Il ne faut bien sûr pas toucher au statut de la fonction publique hospitalière. Mais l’organisation des hôpitaux doit aussi s’adapter aux réalités géographiques. Dans certains territoires, seules des entités publiques travaillent ensemble. Ailleurs, l’offre privée est intégrée à l’offre de soins. Répondre à la réalité du terrain suppose des organisations plus souples.
Comment améliorer la vie professionnelle des personnels hospitaliers, l’une des propositions de votre plate-forme ? Il est nécessaire de donner davantage de marges de manœuvre aux dirigeants hospitaliers dans la gestion des personnels. Un statut et des règles nationales doivent être maintenus. Mais il faut aussi offrir au directeur de l’autonomie dans son management et lui permettre de mettre en place des éléments de motivation et d’intéressement. Ces outils ont été instaurés dans la fonction publique territoriale sans remise en cause du statut. Cela peut aussi se décliner dans les hôpitaux, où l’organisation est encore trop uniformisée.
La tarification à l’activité doit-elle être repensée ? La tarification à l’activité est certes une avancée, mais ses dysfonctionnements doivent être corrigés. Elle a entraîné une course à l’activité pour certaines spécialités dans les cliniques, alors que les hôpitaux, attachés aux valeurs du service public, accueillent tout le monde, offrant à tous le meilleur soin. Nous souhaitons instaurer un système de financement qui reconnaîtrait mieux la part des missions de service public. Par ailleurs, nous voulons une meilleure prise en compte de la pertinence des actes. À titre d’exemple, certains établissements affichent des taux de césariennes de 40 %, bien supérieurs aux taux moyens (17 à 20 %). Faire la chasse aux gestes inutiles permettrait à l’assurance maladie de faire des économies.
Quid des problèmes de financement des hôpitaux ? C’est un problème indépendant des propositions de la plate-forme et sur lequel nous tirons la sonnette d’alarme. Les banques se détournent. La preuve : l’un des plus gros établissements de France a récemment tenté sans succès d’emprunter 5 millions d’euros. Des hôpitaux pourraient peiner à verser les salaires des agents si la crise des liquidités se poursuivait. Le même problème se pose pour le financement des investissements. Des chantiers aujourd’hui lancés nécessitent une levée de fonds. Ils pourraient être interrompus… C’est un problème très sérieux.
Faut-il créer une agence de financement similaire à celle qu’espèrent créer les collectivités locales ? Nous avons rencontré les associations d’élus qui portent ce projet. Mais la nature juridique des hôpitaux est différente de cette des collectivités et nécessiterait que l’État garantisse systématiquement les dettes. Cela reste une très bonne solution pour trouver des liquidités.
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